Une maladie pulmonaire peut être une sérieuse complication de la sclérodermie. Les deux types les plus répandus de maladie pulmonaire chez les patients atteints de sclérodermie sont la maladie pulmonaire interstitielle, également appelée fibrose pulmonaire, et l'hypertension pulmonaire. Ces complications pulmonaires peuvent survenir chez des patients atteints de sclérodermie systémique limitée ou diffuse. Bien que ce soient les manifestations les plus répandues, d'autres formes moins courantes de maladie pulmonaire peuvent également survenir dans la sclérodermie (voir liste ci-dessous).
Il est important de noter que les patients peuvent avoir un problème pulmonaire significatif venant de leur sclérodermie avant que les signes et les symptômes n'apparaissent. C'est pourquoi, il est important d'avoir un contrôle régulier de dépistage de possibles problèmes pulmonaires, en particulier maladie pulmonaire interstitielle et hypertension pulmonaire.
Vu la complexité du diagnostic et du traitement de la maladie pulmonaire dans la sclérodermie, il est conseillé que les patients qui en sont victimes bénéficient de l'avis de médecins experts en sclérodermie, maladie pulmonaire interstitielle et PAH. Ceci demande une étroite collaboration entre le patient, le rhumatologue, le pneumologue et le cardiologue.
Ceci dépend du type de maladie pulmonaire précisée d'après le résultat des études décrites ci-dessus. Par exemple, on peut soigner la fibrose pulmonaire interstitielle avec des immunosuppresseurs, par ex. cyclophosphamide, azathioprine, ou mycophénolate mofetil, suivant le niveau et le degré d'activité de la fibrose pulmonaire. L'hypertension pulmonaire requiert différents traitements, et il existe maintenant de nombreuses médications, par voie orale, inhalation ou intraveineuse pour soigner ces complications de la sclérodermie. Les autres complications pulmonaires requièrent différentes approches de traitement.
Des précautions complémentaires sont indiquées chez tous les patients atteints de sclérodermie avec atteinte pulmonaire quelle qu'en soit le type.
Ces précautions complémentaires incluent :
- Eviter l'exposition au tabac
- Prendre des dispositions pour minimiser le reflux acide
- Faire des exercices appropriés
- Se vacciner contre la grippe et le pneumocoque
- Utiliser de l'oxygène supplémentaire quand le médecin le prescrit.
Dr.Kristin highland and Dr. Richard SilverUniversité de médicine de Caroline du Sud Charleston, SC - Traduction : Anne-Marie Verhoost (Belgique) et le Professeur Jean Cabane (Paris)
L'atteinte pulmonaire est, en fréquence, la seconde complication viscérale de la sclérose systémique, après l'atteinte oesophagienne. Sa gravité potentielle en fait une manifestation sévère qui doit être systématiquement et régulièrement dépistée, même chez des patients asymptomatiques, dans le but de mettre en route, le cas échéant, un traitement adéquat dans les meilleurs délais.
On distingue classiquement deux complications pulmonaires : i) la « fibrose pulmonaire », qui est la conséquence directe d'une inflammation des alvéoles (appelée « alvéolite ») ; et l' »hypertension artérielle pulmonaire » qui peut être soit la conséquence d'une fibrose, soit apparaître indépendamment par atteinte directe des parois des artérioles pulmonaires dont la lumière se rétrécit, augmentant par-là la résistance et donc la pression dans les artères pulmonaires et provoquant, dans les cas sévères, une défaillance cardiaque. Dans les deux situations, la fibrose et l'hypertension artérielle pulmonaire, le commun dénominateur est une perturbation des échanges gazeux, 'est-à-dire une hypoxémie (un manque d'oxygène dans le sang).
La fibrose pulmonaire apparaît préférentiellement dans les scléroses systémiques diffuses, parfois assez rapidement dans l'évolution de la maladie, tandis que l'hypertension artérielle pulmonaire est plutôt, mais pas exclusivement, l'apanage de certains cas de sclérose systémique limitée.
La symptomatologie clinique initiale de l'atteinte pulmonaire consiste essentiellement en une dyspnée (essoufflement) à l'effort d'apparition lentement progressive, souvent accompagnée d'une toux chronique irritative qui ne répond pas bien aux antitussifs mineurs. L'auscultation pulmonaire met alors en évidence des « crépitations », c'est-à-dire des petits bruits secs en fin d'inspiration, qui signent la présence d'un épaississement fibreux du parenchyme pulmonaire, particulièrement au niveau des bases.
Aujourd'hui, une meilleure connaissance de la maladie permet de dépister l'atteinte pulmonaire plus précocement, idéalement, avant le début des plaintes grâce à deux tests essentiels : les épreuves fonctionnelles respiratoires et le scanner pulmonaire. Les tests respiratoires sont simples à réaliser et à répéter. Il s'agit de respirer dans un spiromètre qui mesure les volumes inspirés et expirés. En cas d'atteinte pulmonaire, les volumes sont diminués (« syndrome restrictif »). Le scanner doit être réalisé selon une technique particulière (« coupes fines de haute résolution ») qui permet de bien étudier les détails de l'architecture pulmonaire et de détecter les épaississements fibreux des structures anatomiques.
Si l'un ou l'autre de ces tests est anormal, un lavage bronchio-alvéolaire sera réalisé. La technique consiste à laver un segment du poumon à l'aide d'un petit tuyau positionné dans une bronche via un fibroscope introduit dans l'arbre respiratoire par les fosses nasales ou la cavité buccale. Le liquide de rinçage est réaspiré et son contenu cellulaire analysé au microscope. En cas d'atteinte inflammatoire, on retrouve une quantité anormale de lymphocytes ou de granulocytes neutrophiles ou éosinophiles (globules blancs). Plus exceptionnellement, la confirmation d'une atteinte inflammatoire active viendra d'une biopsie pulmonaire, réalisée par pleurocoscopie (petite ouverture entre les côtes pour permettre le passage d'un endoscope dans l'espace pleural).
La radiographie du thorax, quoique essentielle dans la mise au point, n'est malheureusement pas suffisamment sensible pour servir de test de dépistage de l'atteinte pulmonaire. Elle est fréquemment anormale (aspect en « rayon de miel ») dans les fibroses pulmonaires avérées mais l'absence d'anomalies ne préjuge pas de l'absence d'une fibrose débutante.
Le traitement de la fibrose pulmonaire (ou plus précisément de l'alvéolite) fait appel à la cortisone, prescrite à doses modérément élevées, et à d'autres immunodépresseurs, essentiellement la cyclophosphamide, généralement prescrite par la voie intraveineuse. L'oxygénothérapie peut être utile dans les cas sévères et, à l'extrême, il est exceptionnellement proposé de recourir à la greffe pulmonaire.
Le traitement de l'hypertension artérielle pulmonaire est difficile car aucune médication n'a vraiment fait la preuve de son efficacité, probablement car, à l'inverse de l'hypertension artérielle classique, des modifications anatomiques irréversibles (ou peu réversibles) empêchent une dilatation suffisante du lit artériel pulmonaire. Il est classique de recourir à des anticalciques, des anticoagulants et des prostacyclines.
Faut-il dire que l'arrêt du tabac est impératif, pour tous les patients sclérodermiques en général et dans les cas d'atteinte pulmonaire en particulier...
En conclusion, l'atteinte pulmonaire de la sclérose systémique est potentiellement grave. Heureusement, à côté des formes sévères, il existe aussi des formes peu évolutives, dont la progression clinique et radiologique se chiffre en dizaines d'années.
Un dépistage plus précoce devrait permettre de diminuer la sévérité de cette complication.
J'ai une sclérodermie et je suis essoufflé. Pourquoi ? Que faire ?
Dr. Rimouche AsmaCardiologie -Erasme Bruxelles
La sclérodermie est une maladie auto-immune du tissu conjonctif, caractérisée par des dépôts de fibrose au niveau de la peau et des organes internes associé à des atteintes des vaisseaux et à de l'inflammation avec production d'auto-anticorps.L'essoufflement est un symptôme fréquent chez les patients atteints de sclérodermie, pouvant être en rapport avec des causes diverses. L'anémie par manque de fer est la première à évoquer, elle peut être confirmée ou écartée par une simple prise de sang, mais il est important devant un essoufflement récent ou qui s'aggrave de penser aux atteintes cardiaques et respiratoires de la sclérodermie qui sont les plus graves des complications.Parmi les problèmes respiratoires rencontrés dans sclérodermie, les pneumopathies infiltrantes diffuses (PID), également appelées pneumopathie interstitielles, sont les plus fréquentes. Elles se caractérisent par de l'inflammation et de la fibrose qui touchent les tissus des poumons et les empêche de fonctionner normalement. Elles seraient plus fréquentes dans la forme cutanée diffuse de la maladie, en présence d'anticorps anti-SCL70 (anti-Topoisomérase I) et durant la première année d'évolution de la sclérodermie. Il existe plusieurs types de PID qui évoluent plus ou moins rapidement dans le temps et répondent plus ou moins bien aux traitements. Le diagnostic peut être suspecté par l'auscultation de râles crépitants au niveau des poumons et par des épreuves fonctionnelles respiratoires perturbées avec baisse de la capacité de diffusion. Il sera confirmé par un scanner thoracique qui est plus sensible qu'une radiographie standard. Le traitement comporte, en fonction des formes, oxygène nasal, corticoïdes et/ou immunosuppresseurs. La vaccination contre la grippe et contre le pneumocoque est primordiale pour éviter les surinfections. Au stade avancé de la maladie, une transplantation pulmonaire peut être indiquée.
Les atteintes cardiaques dans la sclérodermie sont variées également. Il s'agit principalement d'épanchements péricardiques (accumulation de liquide inflammatoire dans l'enveloppe du coeur), et d'atteinte du muscle cardiaque (myocarde) par dépôt de fibrose et/ou diminution de l'apport sanguin par atteinte des petites artères du coeur (Figure 1). Cette atteinte du myocarde est fréquente (15% à 35% des patients), mais le plus souvent silencieuse cliniquement. Elle peut cependant se manifester par des difficultés respiratoires surtout à l'effort si le coeur ne peut plus se remplir ou se vider normalement. Les patients avec une forme cutanée diffuse de sclérodermie semblent plus fréquemment touchés, mais l'atteinte cardiaque peut aussi survenir dans les formes limitées. La présence d'ulcères digitaux, d'atteinte musculaire périphérique, d'anticorps anti- SCL70 sont également associés à un risque plus élevé d'atteinte cardiaque. Le diagnostic peut être fait par échographie du coeur, par scintigraphie myocardique et/ou par IRM cardiaque. Le dosage sanguin du BNP ou NT-proBNP (hormone libérée en grande quantité en cas de souffrance du coeur) permet également de détecter une atteinte cardiaque. .
Enfin, la complication la plus sévère de la sclérodermie reste l'hypertension pulmonaire, qui est définie par l'augmentation de la pression dans les artères pulmonaires. Ces artères conduisent le sang pauvre en oxygène du coeur droit vers les poumons pour y être oxygéné avant de retourner vers le coeur gauche dans lesFigure1. La paroi du coeur est constituée de 3 couches de l'intérieur vers l'extérieur: endocarde (couche fine), myocarde (partie épaisse) et péricarde (enveloppe du coeur)veines pulmonaires (Figure2). L'augmentation de la pression dans ces artères peut être liée à 3 mécanismes principaux dans la sclérodermie :
1/ L'atteinte du myocarde de la partie gauche du coeur peut gêner le retour du sang des poumons vers le coeur gauche, entrainant une augmentation de pression dans les veines puis dans les artères pulmonaires, on parle alors d'hypertension pulmonaire « post-capillaire » associée à une atteinte cardiaque gauche.
2/ En présence d'une pneumopathie interstitielle, la destruction du tissu pulmonaire et la diminution de l'oxygène dans le sang peuvent aussi entrainer une augmentation de la pression dans les artères pulmonaires ; il s'agit alors d'une hypertension pulmonaire associée à une atteinte pulmonaire.
3/ L'hypertension pulmonaire peut également être primitive, c'est-à-dire non secondaire à une autre complication, on parle alors d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP).
Figure 2. Circulation pulmonaire : les artères pulmonaires conduisent le sang pauvre en oxygène de la partie droite du coeur (en bleu) vers les poumons, et les veines pulmonaires assurent le retour du sang oxygéné vers la partie gauche du coeur (en rouge)
Dans les deux premiers cas, l'hypertension pulmonaire est la conséquence d'une autre complication, mais dans le troisième cas il s'agit d'une maladie qui commence dans les petites artères des poumons et qui évolue rapidement vers une aggravation de la dyspnée et des signes d'insuffisance cardiaque par défaillance de la partie droite du coeur (insuffisance cardiaque). Cette dernière complication est rare (7-12% des patients) mais tellement grave qu'il est important de la détecter précocement car il existe des traitements spécifiques qui sont plus efficaces quand ils sont instaurés au début de la maladie.Il est recommandé de réaliser une échographie cardiaque une fois par an chez toute personne atteinte de sclérodermie en absence de symptôme, et surtout de répéter l'échographie dès l'apparition ou l'aggravation d'un essoufflement. Si une HTAP est suspectée à l'échographie, le diagnostic doit être confirmé par la réalisation d'un cathétérisme cardiaque droit (en passant par la veine du cou ou de la cuisse) afin de mesurer la pression dans l'artère pulmonaire. On recommande également de réaliser annuellement des épreuves respiratoires et un dosage de BNP ou NT-pro BNP qui sont deux tests utiles pour la détection de cette complication..
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